Marina Jarre eut du mal à se faire à l'idée qu'elle appartenait à une famille. La sienne lui paraissait lointaine, éclatée entre plusieurs langues, cultures, et appartenances religieuses. Dans ce grand récit autobiographique enfin traduit en français, elle évoque cette étrangeté dans une prose singulière et dépeint l'interrogation lancinante qui l'habitat toute sa vie, sur sa place de fille, de mère et d'autrice. Roman de formation autant que témoignage d'une exilée perpétuelle, Les Pères lointains nous offre une étonnante traversée du vingtième siècle.
Marina Jarre est née à Riga en 1925 d'un père juif letton et d'une mère italienne et protestante, puis elle a vécu en Italie de l'âge de dix ans jusqu'à sa mort en 2016. Elle a fait paraître une quinzaine d'ouvrages de son vivant, sans jamais connaître la consécration. Les Pères lointains, publié une première fois en 1987, a été salué comme un chef-d'oeuvre oublié au moment de sa réédition récente, et le livre est maintenant traduit dans le monde entier.
Traduit de l'italien par Nathalie Bauer.
En 1881, sans parler un mot d'anglais mais avec quarante mille dollars en poche, l'architecte valencien Rafael Guastavino embarque pour New York. Son rêve : apporter sa pierre à l'édifice de la modernité américaine en faisant triompher « une architecture sans feu dans un monde sans fantômes ». Épaulé dans l'ombre par son fils et homonyme, il va découvrir la réalité misérable de l'immigration et batailler d'un chantier à l'autre (la gare de Grand Central, la cathédrale Saint-Jean-le-Théologien ou le pont de Queensboro) pour se faire une place au milieu des gratte-ciel. Les Guastavino père et fils, largement oubliés par la grande Histoire, finiront par se fondre en un iconique self-made man dont l'odyssée demeure nimbée de mystère.
Avançant en funambule sur la frontière ténue entre fiction et biographie, ce « roman américain » d'Andrés Barba offre une réflexion fascinante sur l'identité, la filiation et les mirages de la gloire.