Categories
Languages
Formats
Fayard
-
Les mots des femmes - essai sur la singularite francaise
Mona Ozouf
- Fayard
- Esprit de la Cité
- 22 February 1995
- 9782213664996
La France a longtemps passé pour le pays des femmes. Elle a pourtant la réputation d'être aussi celui d'un féminisme timoré qui a tardé plus qu'ailleurs à asseoir ses conquêtes. D'où vient cette timidité? Et pourquoi le discours du féminisme extrémiste trouve-t-il en France si peu d'écho?
C'est ce paradoxe qu'explore le livre de Mona Ozouf, en cherchant à écouter et à faire entendre " les mots des femmes ", ceux qu'elles ont choisis elles-mêmes pour décrire la féminité. Ainsi se succèdent les figures et les voix de Madame du Deffand, Madame de Charrière, Madame Roland, Madame de Staël, Madame de Rémusat, George Sand, Hubertine Auclert, Colette, Simone Weil, Simone de Beauvoir.
La traversée de cette galerie fait découvrir la diversité inventive des cheminements féminins. Elle met en valeur une singularité française dont l'essai qui clôt cet ouvrage restitue l'histoire et les contours.
Mona Ozouf, directeur de recherche au C.N.R.S., a consacré l'essentiel de son oeuvre à la Révolution française, à l'histoire de l'Ecole et à l'idée républicaine. Elle est l'auteur notamment de La Fête révolutionnaire (1976), de L'Ecole de la France (1984) et, avec Jacques Ozouf, de La République des instituteurs (1992). -
La nuit de la Saint-Barthélémy ; un rêve perdu de la renaissance
Denis Crouzet
- Fayard
- Esprit de la Cité
- 2 March 1994
- 9782213648439
On a beaucoup écrit sur le massacre de la Saint-Barthélemy, beaucoup raconté la mise à mort dans Paris de centaines, voire de milliers de calvinistes. C'est pourtant un événement sans histoire, tant demeurent nombreuses les incertitudes qui enveloppent la nuit du 24 août 1572.
Cet ouvrage veut retrouver une mémoire possible de ce moment capital. On ne peut comprendre le déchaînement des violences, écrit Denis Crouzet, que par la restitution de ce qui fut l'une des dernières utopies de la Renaissance: le rêve de concorde de Catherine de Médicis et de son fils, le roi Charles IX. Leur royauté ne se donnait pour fin que de réunir catholiques et huguenots dans une oeuvre magique de paix. Mais alors qu'elle entrevoyait le retour enfin d'un âge d'or, elle fut confrontée au drame de l'attentat dirigé contre l'amiral de Coligny, figure emblématique de la Réforme française. Prise dès lors entre deux factions violemment antagonistes, dans une tentative désespérée pour conjurer le retour de la guerre civile, elle se résigna à un acte préventif déguisé en une vendetta catholique: l'" exécution " de plusieurs dizaines de chefs de guerre huguenots.
Or cette première tuerie fut suivie aussitôt d'un massacre autrement terrible: comme pour répondre à un appel divin, les défenseurs de la religion traditionnelle rougirent la Seine du sang d'un peuple qui se voulait le peuple de Dieu. Alors, pour couper court à cette entreprise d'extermination, il fallut à Charles IX assumer toute une tragédie qu'il n'avait ni méditée ni préméditée.
La Saint-Barthélemy fut ainsi, paradoxalement, le crime d'amour d'une monarchie humaniste, le crime d'un rêve d'harmonie universelle. Elle se raconte ici comme la chronique d'un rêve perdu de la Renaissance.
Denis Crouzet est professeur d'histoire moderne à l'Université Jean Moulin de Lyon. Ses recherches portent sur l'époque de la Renaissance. Il est l'auteur de Les guerriers de Dieu. La violence au temps des troubles de religion (1990). -
Comment imaginer notre existence d'hommes, notre souci du bien, notre présence dans le monde ? Pour explorer ces questions, Rémi Brague propose de retraverser l'histoire de la pensée. Son livre restitue le rapport mouvant de l'homme à l'univers : il en interroge les origines antiques et les sources bibliques, en retrace les inflexions médiévales et en décrit le naufrage à l'époque moderne.
Pendant deux mille ans, l'homme s'est vu comme un monde en petit, dressé vers le ciel, fait pour le contempler. Il a cru que la sagesse qu'il cherchait était en phase avec celle qui gouvernait déjà l'univers. L'ordre et la beauté du monde étaient le modèle imposant du bien. Tendre vers la vertu, c'était imiter le ciel. Sur terre, lutter contre le mal, c'était résorber une infime exception au regard de l'immensité du bien. Là-dessus, Platon était en accord avec la Bible.
Mais cette image antique de l'être dans le monde, qui survivait encore au Moyen Age, allait s'effacer à l'aube des temps modernes. Elle a fait place à des "visions du monde" où des fragments épars empruntés à l'image ancienne se mêlent à des modèles concurrents autrefois refoulés.
Ainsi l'univers a-t-il cessé d'être le précepteur de l'homme. Nous ne savons plus où contempler notre humanité. La sagesse du monde nous est devenue invisible. Il nous faut aujourd'hui la repenser à nouveaux frais.
Rémi Brague, professeur de philosophie à l'Université de Paris I, est l'auteur de plusieurs ouvrages, notamment Aristote et la question du monde (1988) et Europe, la voie romaine (1992). -
C'est dans le roman qu'on peut lire, plus encore et autrement que dans l'histoire, le long et difficile dialogue entre deux humanités que la Révolution française a séparés : celle, aristocratique, de la civilité, du goût, du commerce des esprits, des moeurs et des manières; celle, démocratique, qui devait les congédier au nom de l'égalité.
Mais c'est dans le roman aussi que la Révolution peine à imposer les principes égalitaires. Car il n'y a pas, en littérature, de table rase. Le roman en France reste attaché par mille et un fils àla société que la Révolution a détruite; il ne cesse de les renouer et de les tisser à sa manière : le monde évanoui se perpétue dans les Letres.
Mona Ozouf a voulu le retrouver en relisant quelques romans qui jalonnent le XIXe siècle, de Germaine de Staël à Anatole France, en passant par Balzac, Stendhal, George Sand, Hugo, Barbey d'Aurevilly, Flaubert, Zola. Au fil de ses lectures, elle repère ce que l'Ancien Régime a légué à la France moderne . Elle raconte les espoirs et les illusions qu'il continue à nourrir. Elle met lumière ce que le travail de la démocratie comporte de vitalité, de promesses,des réussites individuelles; mais aussi ce qu'il recèle de banalité, d'uniformité, parfois de désenchantement.
La longue négociation que retrace cet essai entre Ancien Régime et Révolution s'achève sur un compromis, que bientôt l'affaire Dreyfus paraîtra dénoncer, sans pour autant parvenir à en altérer les termes.