Un ABC de la Barbarie (ou Bréviaire des bruits) se présente comme un recensement des lieux communs de la Barbarie, de ceux qui ponctuent le langage journalistique comme autant de slogans affirmatifs, puis qui finissent par infiltrer, à notre insu, le langage commun.
Cet abécédaire est entrecoupé d'une multitude d'éclats empruntés à ce qui formerait, dans le temps et au-delà les frontières, une machine de guerre contre la barbarie : citations de poètes, d'écrivains, de philosophes ; titres d'oeuvres d'arts, de chansons, d'oeuvres musicales, de pièces de théâtre... toute cette production artistique qui, se plaçant radicalement du côté de la vie par sa dimention inventive et critique, produit des outils réflexifs essentiels pour qui décide d'être en résistance.
Qui charpente ce dispositif littéraire moderne, un appareillage de notes raconte le roman de ce livre - où l'auteur nous narre la naissance et la réalisation de cet ouvrage par trois amis, les discussions et événements décidant de tel ou tel choix, les doutes et décisions pris par le dernier d'entre eux, suite à la disparition successive de ces deux accolytes.
Cet ouvrage, ultra contemporain tant par sa facture que par sa dimension critique, décrypte avec une vive précision la langue des médias, étudie son fonctionnement, et l'impact propagandiste qu'elle peut avoir sur les gens.
Déjà publié en 1998, ce roman de la langue rencontra un vif succès, et fut souvent cité dans des ouvrages théoriques sur la littérature contemporaine, mais également politiques ou philosophiques.
Un essai sur la relation amoureuse entre Sade et Renée Pélagie, son épouse, suivi d'une anthologie de lettres qu'il lui a écrites en prison.
Sade l'écrit : Je suis un libertin, mais je ne suis pas un criminel ni un meurtrier.
Enfermé une partie de son existence, il allait fabriquer une machinerie de contre-censure et sur un mode littéral, à partir de l'interdit-faire du romanesque.
On s'est peu intéressé à Renée Pélagie son épouse.
Que sait-on de cette singulière conjugalité ? De cette forme d'amour qui les unit ?
Ce livre est construit en deux parties :
1. 111 notes pour Lacoste de Liliane Giraudon.
2. Épouse Sade : une mini anthologie de lettres de Sade à son épouse.
Ce livre réflexif propose une vision transversale, peu connue en France, de l'affirmation d'un sud global afro-asiatique à travers la résistance anticoloniale et la diplomatie de guerre des Algériens en Asie et au Japon, convoquant l'histoire, la politique, la philosophie politique. Construit d'une façon singulièrement passionnante, par un mixage-collage de plusieurs niveaux d'écritures - éléments textuels (le texte de Seloua Luste Boulbina, des citations, fragments d'articles et prélèvements de livres), de presse et visuels (couvertures de livres, photos, dessins, archives, documents...) -, il constitue aussi un véritable document poétique.
LE LIVRE # Hymne à l'Europe universelle (sic) est une chronique poétique, où il est question du racisme ordinaire envers les Rroms. Des petites remarques insidieuses entendues au hasard de la rue, jusqu'aux décisions de nos élus, Florence Pazzottu recense toutes les étapes participant de la fabrication d'une mythologie raciste les persécutant.
Mais les RomsManouches Tziganes / - qui ne sont pas tous d'exotiques / nomades étrangers venus d'une Inde /mythique -,mais lesManouches Roms / Tsiganes - qui n'ont pour point commun / que le regard malade qu'une Europe malade, dissociée, porte sur eux -, /mais les Tziganes RomsManouches ne sont pas / à intégrer ils sont des parties du corps / de l'Europe que soudain elle rejette / ne veut plus reconnaître les ayant transformés / au XXe siècle par statut d'exception / en errants apatrides.
EXTRAIT DE LA POSTFACE DE FLORENCE PAZZOTU > Écrire en poète, c'est étreindre le corps obscur de la langue et viser la plus grande clarté. C'est tisser une forme-pensée, une prose offerte à la trouée du vers, sans rien éluder des multiples expériences du vivre.
C'est s'éprouver toujours inconnu, intimement étranger à soi-même et étrangement lié à l'autre - et faire l'expérience que le dire qui nous fonde est toujours une adresse à autrui (à je ne sais qui).
C'est nouer ensemble des strates de pensée ou de perception de réalités hétérogènes (rugueuses, rétives ou éruptives), - et déployer un dire qui témoigne d'unmonde en l'inventant toujours autre - en avant de lui-même et à flanc d'impossible : car le récit, s'il est poème, ne colle pas à ce qui est, n'est ni conforme ni adéquat, ne restitue pas, mais performe, - invente et ouvre le possible à venir.
[.] C'est autour dumot Rromque se cristallise aujourd'hui le plus fortement cet enjeu.
À l'origine le sphynx était la sphinge. Mais le sphynx égyptien se substitue à la sphinge grecque, au féminin. Lui donc qui pose le mystère devient ici la sphinge qui est son propre mystère. Ici elle a la bouche malade.
La parole toujours est à naître d'un mystère à élucider. Le code qui permettra de poser ce mystère n'est pas dans la langue maîtresse, mais dans une parole à inventer de la pratique de la vie. La sphinge est hantée d'une parole, d'un féminin d'avant, en lien avec le monde, avec la nature, avec son masculin en creux. en lien avec ce qui la nourrit. Ce poème est la chair de cette hantise.
...
Si la mort, qui est tout ce qui n'existe plus, n'existait plus, tout ce qui n'existe plus existerait encore, et la non-existence de ce qui n'existe plus n'existerait plus. Mais en n'existant plus, la mort ne pourrait faire exister ce qui n'existe plus et sa non-existence ferait ne pas exister la non-existence de ce qui a existé. La mort ne peut donc exister qu'en faisant exister ce qui n'existe plus.
D'où nous déduirons que c'est parce que ce qui a existé n'existe plus que la mort existe...
La bonne conscience des Européens à l'égard desmigrant-e-s et des réfugié-e-s varie selon les circonstances;
Ainsi, lorsque les atrocités de la guerre en Syrie apparaissent dans toute leur crudité, elle s'éveille et s'affirme au grand jour.Malgré le poids des clichés et la déliquescence politique généralisée d'une Europe où les opinions vacillent aumoindre séismemédiatique, un peu partout en France et dans d'autres pays des gens semobilisent pour accueillir ces fugitifs toujours plus nombreux, qui passent nos frontières avec, pour seuls bagages, leurs tragiques épopées. Face à cette situation inédite, certains gouvernements, plus oumoins timorés, cherchent - ou font mine de chercher - des solutions d'aides, d'autres verrouillent leurs frontières et n'hésitent pas à lancer leurs cerbères armés contre cette populace désorientée - tandis que l'Allemagne, à la surprise générale, se pose en toute magnanimité comme État providence.
Mais les attaques terroristes de Paris et Saint-Denis du 13 novembre 2015 changent soudainement la donne, et renvoient à la case départ le sort des déplacé-e-s, déporté-e-s, réfugié-e-s, migrant-e-s. Il n'est plus question d'hospitalité. Désormais, pour la grande majorité des gouvernements européens (dont la France), ces personnes, hier victimes à plaindre, deviennent indésirables assimilées à des terroristes : des jetables. Les frontières, à l'instar des opinions publiques, se referment. On « peut » désormais les renvoyer au pire d'où ils viennent, à l'eau ou ailleurs. Qu'importe ce qu'ils et elles deviendront, on entretient et nourrit l'amalgame :
Ils et elles paieront pour les terroristes.
La mémoire historique est courte.
À la croisée du théâtre, de la performance et de la poésie - sans jamais s'arranger du confort d'un genre - Nadège Prugnard rend audible les paroles suffoquées - car selon d'où on vient et ce qu'on a vécu, raconter est difficile, et être entendu encore plus malaisé. Avec "M.A.M.A.E.", des femmes s'explosent en public, renvoyant aux lecteur-e-s / spectateur-e-s toute la violence accumulée, que ce soit dans la vie ou au théâtre ; "Monoï", « Indescriptible Notre-Dame des outrages », rappelle que l'intime aussi est politique, dans un récitatif débridé et volcanique qui met à mal tous les poncifs se rapportant au désir, à la sexualité et à la jouissance féminine pour s'imposer, enfin, pulsion de vie ; "Putain de campagne !" raconte, à travers leurs propres paroles, les doutes, rancoeurs, colères, espoirs et désirs des habitant-e-s des campagnes ; "Suzanne takes you Down", écrit à partir de témoignages, relate la résistance en Auvergne avec, comme compagnonne, le fantôme de Suzanne, actrice-
Ce premier livre regroupe la totalité des Poèmes-partitions encore inédits (écrits entre 1955 et 1965), poèmes composés pour être lus à voix nue et en direct au public.
« Ces premiers poèmes, à compter de cette date [1955], je les ai intitulés Poèmes-partitions par référence, bien entendu, à la musique, où une oeuvre qui existe, préalablement en tant que partition, ne vit totalement que lorsque cette partition est exécutée. Il en était ainsi de même pour moi, avec la poésie, dans la mesure ou le poème, disposé sur le papier tel une partition simpliste, me fournissait rythmes, intensités, vitesse, ruptures et silences, n'existant donc pleinement, en tant que poème, qu'une fois dit publiquement à haute voix, ou retransmis par un support tel que un disque vinyl ou un CD ».
Introduisant cet ensemble, nous rééditions (pour la première fois depuis 1955) Sitôt dit, le premier livre de Bernard Heidsieck, et son unique livre de «poésie sèche».
Avec Le rat empoisonné, Jann-marc Rouillan clôt une trilogie sur la chronique de samise en liberté. Dans Autopsie du dehors (paru enmars 2012), l'auteur raconte sa sortie de prison et son quotidien de relégué sous surveillance électronique. Le tricard (paru en septembre 2013) relate samise en liberté conditionnelle. La prison est toujours présente, dans la chair et dans lamémoire. Et le récit est émaillé de rencontres, de discussions, d'échanges.
Dans ce dernier opus, Jann-marc Rouillan continue d'explorer cemonde dont il futmis à l'écart pendant plus de 25 ans. Tout en composant avec les règles imposées par les juges : les interdictions de séjours, les interdictions de prises de paroles, les interdictions de rencontrer certaines personnes, etc., il tente de se construire une vie en dehors des murs de la prison. La portée plus évidemment réflexive de cette troisième chronique n'est pas seulement porteuse d'une analyse radicale de notre société, qui voit le gouffre se creuser entre classes dominantes et populations opprimées et exploitées. C'est également le témoignage, rarement porté, de la difficulté pour un ex taulard de reprendre le cours normal de sa vie. Et c'est ainsi que l'auteur raconte ses relations kafkaiennes avec les diverses structures administratives, juridiques, économiques... qui contraignent autrement que la prison, mais avec cette même implacable volonté de casser chez l'ancien prisonnier toute velléité de s'en sortir...
Un monologue acide sur la vie au sud de l'Algérie, par l'unique employé de la morgue d'un petit village pétrifié entre l'ennui et la pauvreté.
Moussa est le seul employé de la morgue de BalBala, petit village perdu au sud de l'Algérie. Tous les morts du bled passent ici : femmes tuées par des hommes jaloux, personnes terrassées par des cancers provoqués par la pollution de l'importante plate-forme pétrolière voisine (à la fois distilleuse de mort et seule source de travail...), migrants, contrebandiers et autres fuyards, enfants abandonnés à eux-mêmes, suicides, victimes de scorpions... C'est à une véritable étude socio-politique sauvage à laquelle se livre Moussa, en enregistrant ses réflexions à l'aide d'un dictaphone, comme le lui a demandé Aziz, son seul confident et ami, dans le but d'écrire un livre - Aziz, qui est également le trublion du village, celui qui n'a de cesse de dénoncer les injustices,de pointer du doigt les véreux de toutes espèces : religieux, politiques, patrons, etc.
Jusqu'au jour où Aziz s'immole en plein tribunal de BalBala, et se retrouve à la morgue, en compagnie de son ami Moussa...
BalBala (mot qui veut dire tumulte en arabe) est un petit village fictif imaginé près de Ouargla, ville qui connaît une forte agitation sociale en ce moment avec le soulèvement des chômeurs du Sud (guidés par le Comité national pour la défense des droits des chômeurs, CNDDC) qui réclament un peu de justice dans l'accès au marché du travail dans les champs pétroliers. Et c'est exactement ce qu'aborde ce monologue.
Le texte repose, en partie, sur des enquêtes menées personnellement par l'auteur (reporter au quotidien algérien El Watan), à plusieurs reprises, dans le Sud algérien, où des activistes comme Aziz sont régulièrement persécutés et condamnés. L'un d'eux, un jeune juriste sans travail, avait même défrayé la chronique en s'immolant dans le bureau du directeur de l'agence de l'emploi de la ville de Ouargla...
Gang blues ecchymoses, un roadmovie visuel et poétique signé Sadie von Paris et Véronique bergen.
Sous l'objectif de la jeune photographe Sadie von Paris, les cris d'une génération en quête d'un ailleurs, un voyage dans la jungle de l'asphalte, l'ivresse des sens, les rituels des substances et de l'éros.
Aux paysages mystico-urbains de la colère shootés par Sadie von Paris se noue la danse des mots de Véronique Bergen.
Un livre placé sous le signe de l'insurrection contre tout ce qui emprisonne, un braquage du réel étriqué un « non » à l'assassinat de nos existences un rugissement de tendresse aussi une création de mondes alternatifs dans le chaos acosmique contemporain Tout ce qui bouge est politique.
Poésie insurrectionnelle, Extrait des Nasses est un texte-fleuve qui témoigne d'une jeunesse dont la soif de vivre ne peut se contenter d'aucune des propositions émanant d'une civilisation malade en voie de fascisation, qui ne fonctionne que sur des jeux de domination. Ici, chaque fragment de texte est projectile autonome, et le tout : soufle de vie. ... Nous nous déployons. Habités par le vide que déploie la logique de votremonde. Nous n'avons pas d'avenir.
Le feu prenait bien. Des sorties. Nous n'en voulons pas. Arracher....
«Il y a dans ce livre, une conclusion politique, celle-ci:Nous faisons pousser les ronces», conclue Jean-Marie Gleize, dans la préface qui ouvre ce livre.
Une série de performances photographiques de Fabienne Létang, confinée dans son studio, avec des textes de Liliane Giraudon, Amandine André et A.C. Hello.
« ...Désormais les entraves intimes, sociales et politiques resserrent tragiquement leurs liens. La peur se fait de plus en plus prégnante. Dans un futur proche, ne nous restera bientôt comme dernier geste que celui de prendre notre tête entre nos mains ou lever les yeux au ciel... ».
Dans cet état réflexif, confinée dans son studio, Fabienne Létang a conçu et réalisé ces performances photographiques, sur lesquelles les auteures Amandine André, A. C. Hello et Liliane Giraudon réagissent.
« Cela ne me faisait pas envie, d'imiter les hommes ; si je les imitai, c'était parce que je cherchais une issu, pour cette unique raison », fait dire Kafka au singe Rotpeter. À travers cette exposition ready made d'oeuvres fabriquées par des animaux, le poète Julien Blaine offre une vision aussi comique que tragique du monde de l'art, tout en essayant d'« établir une communication entre le monde perdu et le monde contemporain ».
Aujourd'hui, alors qu'il a cessé toute pratique artistique (on se souvient de sa dernière performance : Le Grand dépotoir, où il abandonne au public la totalité de ce qu'il reste de son oeuvre visuelle - plus de 600 oeuvres), c'est par la stratégie du ready-made que Julien Blaine continue son écriture, en exposant non pas ses oeuvres mais celles d'animaux (Lolo l'âne, Congo le chimpanzé, Pigcasso la truie, Nong Thanwa l'éléphanteau, Hunter le shiba-inu, Juuso l'ours, Poulpo le poulpe). Ainsi, il continue son double chantier : la mise en abyme de la faillite de l'oeuvre d'art et de son devenir-marchand ; et sa recherche constante des langages originelles, ici à travers de ce que peuvent nous dire les animaux : par delà le cocasse de ces bêtes imitant l'homme, la suggestion est faite au visiteur de se muer en lecteur du monde et, par-delà tout ce qui nous sépare aujourd'hui du règne animal, de retrouver les traces, les signes, parfois infimes, d'un dialogue qui n'est pas mort, seulement tu.
Publié à l'occasion de l'exposition éponyme de Julien Blaine à L'Art Hic & Hoc, La Ciotat, en août 2022, dans le cadre de la cinquième édition du festival d'écritudes contemporaines « Tournez La Plage ».
Le Patient est le récit sans fard du quotidien d'une humanité blessée, oubliée, vidée, épuisée, mise à l'écart : celle des hôpitaux psychiatriques.
Jérôme Bertin nous raconte le quotidien de cet hôpital d'un quartier populaire de Lille, les gens qui y vivent (patients, mais également psychiatres, infirmiers, personnes de l'accueils.), et les rencontres, les menus événements et autres incidents ponctuant un temps qui s'étire dans l'ennuie et la déprime.
Quelque chose est un texte dense, d'une densité extrême qui tient aussi bien du souffle que de la chair. De la chair, il a la compacité, la force, les rondeurs ; du souffle : les syncopes, le halètement, la fragilité.
Quelque chose, prose poétique, joue des antinomies non pas pour que le jeu des contradictions suggère un sujet en creux, mais bien plutôt pour affirmer un manque que malgré tout l'écriture n'arrivera peut-être jamais à dire : ni et, ni ou, et/ou peut-il se créer, peut-il s'écrire - peut-il se vivre ?
Quelque chose, comme une missive, comme un chant, est une adresse à l'aimé.
La personne qui écrit est traversée par l'aimé - est traversée par le sujet.
Ici, le poème est la peau retournée du sujet, l'en-soi de l'aimé.
La lecture de Quelque chose est une expérience qui a à voir avec la lecture des courts textes pornographiques de Michel Surya, comme L'impasse (Al Dante, 2010).
Après 25 années passées de prison, et une semi-liberté (17-12-2007/2-10-2008) abrégée à cause de quelques mots délivrés à la presse, Jean-Marc Rouillan, militant du groupe Action Direct, est enfin " dehors " depuis mai 2011 - mais sous surveillance électronique (un bracelet électronique lui a été mis à la cheville), avec des horaires de sorties à respecter : en semaine de 10h à 20h30; le samedi de 14h à 19h.
Et obligation de rester enfermé chez lui le dimanche. Pendant ses premiers mois de liberté, Jean-Marc Rouillan s'immerge dans ce monde "du dehors ". Lorsque sa journée de travail se termine, et jusqu'à ce que sonne l'heure fatidique du retour obligé chez soi, il marche dans Marseille, rencontre et écoute les gens, observe leur façon de vivre, s'attache à comprendre ce qui les motive, s'intéresse à leurs problèmes, et aux multiples façons qu'ils gèrent (ou pas) leur quotidien, avec leurs joies, leurs colères et leurs doutes.
Ainsi, il rencontre des hommes et des femmes, des ouvriers, des chômeurs, des poivrots, des poètes, des artistes, des intellectuels, des gens de la rue, des gens biens sous tous rapports et des voyous. Des révoltés et des soumis. Ce livre, écrit dans la solitude du dimanche, présenté comme un carnet, se construit plus en bribes et en accumulations d'indices que comme successions de narrations construites.
Il note des gestes, des faits, des images, des mots, parfois importants, parfois a priori infimes (pas de hiérarchies dans ce qui est raconté) qui permettent de penser et de réagir face à ce monde de dehors (qui souvent fait penser à une autre forme de prison). C'est dans l'accumulation de ces indices, et dans la faculté du lecteur à les mettre en lien les uns aux autres que la matière à penser se construit.
Et le constat est plutôt triste : Derrière la rumeur des bars, des rencontres, des discussions, des amitiés affirmées et d'autres naissantes et des rires, s'entendent les démerdes individuelles, les arrangements avec la solitude, les paroles vaines, les révoltes étouffées, le tout sur un fond de mémoire politique effacée. Ce carnet est illustré de dessins de Marie-Claire Cordat. Dessins noirs, expressifs, violents, effectués à la lame de rasoir sur carte à gratter.
Connu pour être l'un des créateurs du groupe « Action Directe », Jean-Marc Rouillan activiste politique et écrivain, était en prison depuis 1987, avec une brève période où il a bénéficié d'un régime de semi-liberté, du 17 décembre 2007 au 2 octobre 2008.
Suite à un interview publié dans l'Express ce régime à été annulé « pour quelques mots », le tribunal d'application des peines anti-terroristes jugeant que ses propos constituaient une « apologie de la lutte armée ». Il est de nouveau en semi-liberté depuis le 19 mai 2011, avec l'obligation de porter un bracelet électronique.
Ce collectif est constitué de textes réflexifs, poétiques ou fictionnels, qui interrogent, en lien ou en discussion avec Jean-Marc Rouillan, la situation politique actuelle, l'hypothèse insurrectionnelle ainsi que les notions d'action et d'« engagement ».
Deux textes de Jean-Marc Rouillan, qui témoignent de sa vie en prison et font montre d'une « pensée en action », ouvrent ce dossier.
Ce livre, au titre évocateur, regroupe plusieurs textes, chacun proposant la vie d'un homme illustre écrit par un autre homme illustre. En son et en mots, et au gré de techniques de composition propre à chacune de ces vies (que ce soit celle de l'écrivain, ou celle du sujet), prendront successivement corps l'Empereur Tibère (par Suétone), Christophe Clomb (par Jules Verne), Richard Wagner (par Nietzsche), Jésus (par Ernest Renan), Dante (par Boccaccio), Descartes (par Adrien Baillet), Napoléon 1er (par Stendhal), Sigmund Freud (par lui-même), James Joyce (par Italo Svevo), et Margaret Thatcher (par Hugo Young). Ici, ce sont les tics de langage, les mises en pages, les récurrences stylistiques qui font portrait.