La collection Chemins Philosophiques a pour objet de favoriser la compréhension
de notions et d'étayer la réflexion philosophique. Chaque ouvrage offre un
traitement cohérent et complet de la problématique par le biais de deux
approches complémentaires de la notion concernée : un exposé de l'enjeu
philosophique et des principales articulations théoriques de la notion, suivi
d'une présentation de textes accompagnés d'un commentaire. Ces deux parties
permettent ainsi au lecteur de saisir la complémentarité de la réflexion
philosophique contemporaine et de la tradition philosophique.
L'approche métaphysique de Bergson est construite. Elle n'est ni constituée, ni vécue. Elle est le produit d'un dépassement processuel de la pensée humaine qui prend appui sur des éléments qui la font sortir de ces gonds. Ce n'est ainsi que dans la transcendance que se construit le véritable plan d'immanence. Une transcendance faite d'hétérogénéité à soi, de non originarité constitutive de la pensée. Si cette dernière commence par tracer une ligne de démarcation et chercher d'abord ce qu'elle est « de droit », elle est foutue. Le « de droit » n'est pas au commencement. Il n'est que le résultat non substantiel d'un mouvement qui ramène la pensée philosophique vers soi et qui du coup en même temps la détotalise. Il n'y a pas d'autonomie du philosophique dans cette perspective. Cette discipline se construit sur un fondement qui n'est pas le sien et c'est ainsi seulement qu'elle parvient à parler d'un réel relationnel, pour lequel l'attribut a plus de valeur que la substance et les modes. Telle est peut-être la solution finale du problème de l'expression : ce que l'entendement perçoit d'une substance comme constituant une essence, pourvu que l'entendement en question ne soit justement pas que le nôtre et que la substance ne soit qu'une abstraction. La pensée philosophique est hétéronome, elle est cette discipline pour laquelle toute matière étrangère et bonne et pour laquelle seulement ensuite toute bonne matière doit lui être étrangère. Ce « devoir » émerge dans un mouvement. Il ne l'explique pas. Il ne lui préexiste pas. Ce n'est donc que par cette hétéronomie que la pensée philosophique peut apprendre paradoxalement elle-même à se tenir debout toute seule. Elle ne le fait que contre la science et l'art et non pas sans eux. Et être contre, comme chacun sait, c'est aussi être tout-contre.
Un nouveau paradigme scientifiques'affirme depuis deux décennies : le chaos. Les récentes découvertes en mathématiques, physique, chimie, biologie font état de phénomènes complexes qui remettent fortement en question l'idée de nature.
Mais l'univers, du coup, n'est-il pas voué à l'inintelligibilitéoe Comment penser un ordre du monde auquel le désordre participe?
Paul-Antoine Miquel s'attache d'abord à retracer l'évolution du statut du désordre chez les philosophes depuis l'Antiquité, avant d'étudier, en compagnie de Nietzsche, Bergson, Canguilhem et Deleuze, la relation entre l'ordre du monde et l'événement - imprévisible, contingent. Assumer philosophiquement la contingence à l'oeuvre dans la nature, tel est, en définitive, le défi.
Paul-Antoine Miquel est maître de conférences de philosophie à l'université de Nice. Ses travaux de recherche portent essentiellement sur les rapports entre la science et la philosophie.
Ce livre traite de deux problèmes : comment pouvons-nous faire quotidiennement l'expérience du monde extérieur alors que tout en elle semble nous ramener à nos sensations ? Et qui fait le mieux cette expérience ? Ce n'est pas l'homme de tous les jours, c'est le scientifique. Le processus d'objectivation à l'oeuvre dans l'expérience systémique du scientifique est aussi ce qui nous dégage du solipsisme. Il nous engage dans un autre monde, dont nous faisons partie et qui n'est pas le nôtre. Cet engagement prend la forme d'une expérience d'immanence redoublée, à partir de laquelle nous proposons de reconstruire le concept de Nature. Le second problème est le passage d'un système physique auto-organisé du type « transition de phase » à un système biologique. L'hypothèse de l'auteur est que ce dernier n'est pas seulement soumis à certaines contraintes qui rendent sa structure causale ouverte et agentive. Il forme un monde de contraintes qui se dédouble de sa structure causale et dont la structure normative est elle-même ouverte et agentive. C'est ainsi que le problème du redoublement d'immanence, d'abord aperçu du point de vue des expériences que peut faire la conscience, apparaît désormais à l'intérieur des systèmes que la pensée théorique du savant analyse.
Cet essai a deux ambitions. Il s'agit d'abord de montrer que la Biosphère n'est pas la Terre. En faisant de Gaïa une entité mixte l'ingénieur anglais James Lovelock s'est placé dans une position confortable : il n'y avait plus besoin de se demander comment la Biosphère a pu émerger sur Terre, autrement dit quelle sont les conditions qui ont rendu possible son émergence. Nous pensons au contraire que cette question est fondamentale et que la science est aujourd'hui dans une position où il devient possible d'apporter une réponse. C'est une réponse qui sera forcément théorique, et forcément à la frontière entre chimie, physique et biologie. C'est à cette frontière que nous allons faire apparaître le personnage de « Vénus » en hommage au philosophe romain Lucrèce. Vénus n'est pas Gaïa, et pourtant elle vient de Gaïa, sa mère nourricière, sa coquille.
Ensuite nous allons aborder sous un certain angle la question de la relation entre l'humain et la biosphère. Nous allons concevoir l'humain de manière différentielle comme un noeud de relations avec les autres êtres vivants, et les conditions abiotiques. C'est dans cette perspective que nous allons aborder la question de sa triple responsabilité vis-à-vis de la manière dont il sculpte les caractéristiques biologiques des générations futures, vis-à-vis de la manière dont il met en danger leur existence, et finalement de la manière dont il met en danger l'existence future de la biosphère elle-même. Nous nommerons cette triple responsabilité : « Prométhée ».
Au sujet de Prométhée, notre ambition est de formuler un nouvel impératif éthique : agis de telle sorte que tu prennes en compte les devoirs que tu as vis-à-vis de générations futures et de la biosphère, comme si elles pouvaient revendiquer des droits. Dans cet impératif, le temps se met d'un seul coup à fonctionner à l'envers et les générations futures peuvent se mettre à parler. L'impératif responsabilité fait donc intervenir des interlocuteurs virtuels.
Nous montrons les conséquences que l'application d'un tel impératif peut avoir sur 7 points fondamentaux : croissance démographique exponentielle depuis 50 ans ; taux de disparition des espèces multiplié par cent depuis 1900 et destruction des milieux naturels ; non renouvellement des ressources naturelles ; réchauffement climatique, dont au moins une partie est anthropique ; accroissement des inégalités sociales, et concentration du capital dans des grandes entreprises mondiales ; croissance disruptive du développement biotechnologique (plus ce développement augmente, et moins il y a de contrôle théorique et scientifique sur ce qui se développe) ; instabilité politique internationale conjuguée à la prolifération nucléaire. Si on suit notre impératif, aucune de ces questions ne peut plus être laissée sous la seule responsabilité de la main invisible des tenants d'une économie libérale.
Elles sont à présent sous le rétrocontrôle virtuel des générations futures et de la biosphère qui revendiquent leurs droits à travers nous.
Ce livre voudrait soutenir une thèse sur le vital : ce n'est tout simplement pas au philosophe d'en parler le premier.
Il n'a rien à dire sur cette question avant ce que fait le savant. Et nous voulons même l'affirmer en un sens plus radical : il y a bien des aspects physiques du vital. Ainsi commence à se dessiner une perspective : pour traiter la question du vital, il faut accepter d'abord que le point de vue de la conscience ne soit pas originaire. Ne nous fions pas aux apparences : tout ne commence pas avec le verbe de la conscience.
Tout commence donc avec un geste, un geste systémique. Le point de vue systémique est celui de la science et son geste nous précipite hors du monde de la conscience. Il n'est donc pas possible de comprendre le vital, sans interpréter, sans écouter ce mouvement de bascule qui va et qui vient entre le monde de la conscience et le monde de la science interminablement. C'est ainsi que commence à naître une nouvelle métaphysique de la nature, une philosophie, non plus de l'être de l'étant, mais de cet être dans cet étant.
Cette collection se veut didactique, maniable et la porte de tous.
La philosophie d'Henri Bergson procède par images. L'intuition n'est donc pas seulement une méthode, mais aussi un langage qui ne parle au propre que lorsqu'il parle au figuré. Elle est une lanterne obscure qui dispense partout de la lumière. Dans L'évolution créatrice, l'intuition n'est pas une simple métaphysique qui se ferait sans la science. Elle est aussi une dialectique qui chevauche l'intelligence, une pensée en durée qui se nourrit de la pensée spatiale.
La science et l'art viennent en premier. Ils sont les prolongements du sens commun. La philosophie ne peut rien faire sans eux. Comme Prométhée, comme le voleur de feu, elle se nourrit de ce qui n'est pas fait pour elle. Comme Hermès, comme le messager, elle en fait un langage et un univers que tous doivent pouvoir comprendre et dans lequel tous doivent pouvoir se retrouver.
Cet ouvrage, destiné aux futurs biologistes et aux philosophes de la vie, a pour but de fournir des outils de réflexion pour comprendre l'origine des représentations et des métaphores explicatives des phénomènes biologiques utilisées quotidiennement dans les laboratoires, mais également pour questionner leur pertinence et leurs limites.
Au-delà d'une simple description historique de l'évolution des concepts sur le vivant, il s'agit de soulever les limites des concepts, hérités des sciences de la nature, dans leur utilisation en biologie actuelle, et notamment en génétique moléculaire. Une argumentation de qualité, basée sur des données expérimentales, montre les limitations de ces concepts et de ces métaphores, notamment dans la compréhension dynamique et interactive des processus biologiques.
Cette démarche est d'autant plus essentielle aujourd'hui dans une période où la biologie, et plus précisément la génétique, questionne ses concepts (limites du déterminisme) et repense ses cadres de pensée.