Armes de destruction massive, pollution, extinction démographique : tout ce qui menace l'homme en tant qu'espèce vivante ne fait plus de doute. Mais il existe des facteurs qui, venant de l'homme lui-même, sapent son humanité propre. Ils ont beau être difficiles à saisir, c'est eux que Rémi Brague tâche de repérer à travers une analyse fulgurante et radicale de l'idée d'humanisme.
Car il ne s'agit plus de savoir comment nous pouvons promouvoir la valeur homme et ce qui est humain. La question, désormais, est plus profonde : faut-il vraiment promouvoir un tel humanisme ?
Nous ne pouvons plus nous bercer d'illusions. Il est facile de prêcher un humanisme réduit aux règles du vivre-ensemble, mais comment le fonder ? La pensée moderne est à court d'arguments pour justifier l'existence même des hommes. En cherchant à bâtir sur son propre sol, à l'exclusion de tout ce qui transcende l'humain, nature ou Dieu, elle se prive de son point d'Archimède. Est-ce une façon de dire que le projet athée des temps modernes a échoué ? C'est au lecteur d'en juger.
Qui est le dieu des chrétiens ? Quelles en sont les caractéristiques ? Quelle en est la singularité ?
À ce sujet vaste et quelque peu intimidant, le philosophe Rémi Brague répond en sept chapitres concis, informés, stimulants. Que Dieu soit bien au-delà des représentations que l'on s'en fait, c'est une affaire entendue, mais cela ne justifie pas pour autant les approximations et les confusions qui sont de mise aujourd'hui dès qu'on aborde les questions religieuses.
Car tout le monde ne se fait pas de Dieu la même idée, et celle que s'en font les chrétiens est, au fond, plutôt surprenante.
Qui est alors ce dieu et qu'en pouvons-nous connaître ?
Il est un, mais pas de n'importe quelle façon ; il est père, mais non pas mâle ; il a parlé, mais pas pour nous demander quoi que ce soit ; il pardonne, mais sans ignorer la décision de notre liberté.
Au terme de cette enquête, le lecteur pourra accepter ou refuser le dieu des chrétiens ; dans les deux cas, il le fera en connaissance de cause.
Il faut être « modérément moderne », et non « absolument », comme le préconisait Rimbaud. Et prendre ses distances d'avec cette maladie, la « modernite ». De ces fameux « Temps Modernes », que peut dire un philosophe qui a décidé de ne pas avancer masqué ?Complaisante modernité, qui se clame en « rupture » avec tout ! Pourtant, qu'a-t-elle inventé ? Les idées modernes ne sont que des idées prémodernes, maquillées comme une marchandise volée.Avec le recul et la capacité d'analyse que lui permet sa formidable culture, Rémi Brague nous offre une série de réflexions incisives sur les notions de Modernité, de Culture, d'Histoire, de Sécularisation, de Progrès... Chemin faisant, il met en avant des penseurs qui sortent des sentiers battus, des idées qu'on avait oubliées, et des rapprochements qui font avancer.
Il y a trente ans, quand on voulait être pris au sérieux, on parlait politique ; évoquer la religion, en revanche, était le meilleur moyen de faire rire. Aujourd'hui, la situation s'est inversée ; la religion fascine, inquiète, et la peur s'installe à l'égard de certaines de ses formes, voire de la violence que, suppose-t-on, elles fomentent.
Il importe d'essayer d'y voir un peu clair. Poursuivant le travail d'élucidation qu'il a entrepris depuis une dizaine d'années, Rémi Brague s'interroge sur la légitimité même du terme « religion », puis sur le contenu propre des religions - avant tout sur celui des « trois monothéismes ». Qu'est-ce que la religion nous dit de Dieu, et de l'homme en tant qu'il est doué de raison ? Qu'est-ce qu'elle nous dit d'autres domaines de l'humain comme le droit, la politique ? En quoi garantit-elle - ou menace-t-elle - la liberté morale, sinon l'intégrité physique, des individus ?
Un essai salutaire pour délaisser nos a priori et prendre de la hauteur.