La philosophie du langage, l'esthétique et la philosophie de l'histoire de Walter Benjamin ont fait l'objet de travaux conséquents, qui ont assuré la reconnaissance et balisé l'interprétation de textes essentiels. La pensée anthropologique, en revanche, reste un champ insuffisamment exploré, bien que central dans l'oeuvre de Benjamin. Elle trouve sa source dans une réflexion approfondie sur la question du corps, qui captive le philosophe du milieu des années 1910 jusqu'à la fin de sa vie et ouvre des perspectives inédites sur la théorie de la connaissance, l'éthique et la théorie politique. Ce livre tisse ensemble les différents fils qui constituent cette pensée du corps et relève l'ampleur des enjeux que ce questionnement soulève. Les textes de Benjamin rendent remarquablement compte du défi que doit relever la philosophie européenne à l'aube du xxe siècle : prendre en considération le caractère corporel de l'expérience et, ce faisant, l'historicité de la connaissance, la relation constitutive à l'altérité, l'expérience de la vulnérabilité, l'engagement matériel et affectif dans le monde social. Suivre l'évolution du questionnement sur le corps met en lumière la cohésion de l'oeuvre de Benjamin, tout en en éclairant la position singulière qu'elle occupe au sein de son contexte théorique d'émergence. Si la réflexion de Benjamin sur la corporéité ouvre des perspectives sur le paysage philosophique de l'Europe du tournant du siècle, elle entre aussi en résonance avec des questionnements qui animent la philosophie contemporaine.
Le numéro hivernal d'Espace art actuel a pour thème « Blessures ». Ses blessures, peut-on en guérir ? « Faut-il, dans ce cas, les rejeter dans l'oubli ou plutôt entretenir avec elles une forme de réconciliation libératrice ? [...] Dans le domaine de la représentation esthétique, qu'est-ce que le geste artistique est en mesure d'apporter pour soulager les esprits ? [..][ Et si] les représentations de la souffrance peuvent éveiller les consciences, peuvent-elles réparer ce que l'histoire a fait subir à des individus ? »(André-Louis Paré) Édith-Anne Pageot, Florian Gaité, Ray Cronin, Sydney Hart et Mirna Boyadjian explorent ces questions dans leur texte en s'intéressant au travail des artistes Nadia Myre, Rebecca Belmore, Jaime Black, Hannah Claus, Maria Hupfield, Sonia Robertson, Kader Attia, Emily Falencki, Eric Fischl et Teresa Margolles. Le dossier est suivi, comme d'habitude, des sections « Entretien », « Événement » et « Comptes rendus d'exposition » dont ceux de la documenta 14 de Kassel et de Skulptur Projekte de Münster.