« La société de 2070 sera moins individualiste, plus fraternelle, parce qu'elle aura traversé des épreuves écologiques, sociales, politiques. Elle sera plus multiculturelle, plus mélangée, moins occidentalisée. »
Un étudiant en majeure Politique et gouvernement, 21 ans
« Ce sera une société régie par la résignation, un individualisme exacerbé à l'extrême, une domination totale des écrans sur l’esprit humain. Un monde où le milieu naturel aura tellement été défiguré par l’action humaine qu’il n’existera plus qu’à travers d’anciens contes. »
Une étudiante en majeure Humanités politiques, 19 ans
En 2022, les étudiants de Sciences Po, comme toute la jeunesse, ont une vision de l’avenir oscillant entre espoir et pessimisme radical. Ils se singularisent néanmoins par un engagement politique marqué : démocrates convaincus, ils ont un fort tropisme à gauche et militent pour une citoyenneté active.
Vingt ans après une première consultation cherchant à cerner le profil socio-politique des étudiants de Sciences Po, cette nouvelle enquête en saisit les évolutions les plus remarquables et laisse entrevoir à quoi ressembleront les responsables économiques, culturels et politiques de France et d’ailleurs.
Des citoyens roumains aux profils très différents se retrouvent l'un après l'autre victimes d’arrestations arbitraires. Tandis qu’ils se remémorent leurs dernières heures de liberté, tentant de comprendre la raison de leur incarcération, l’irrationalité du système répressif côtoie le burlesque, égratignant copieusement au passage le couple Ceausescu : un régal !
« Elle n’était pas venue de Djakarta ni de Kuala Lumpur comme les modernes esclaves. Non, juste traversé la Mer rouge… »
Suivez Zinesh, émigrée érythréenne catholique au service de princesses saoudiennes, hystériques ou mesquines, toutes enfermées dans leurs cages dorées.
L’univers feutré et pesants de palais saoudiens, au sein d’un pays prison ou chacun s’épie, dévoilé par la petite porte : celle des domestiques.
Une écriture sensible, une héroïne insolente et rusée : foncez !
Retranchés dans leur palais présidentiel, le fils « occidentalisé » et la très jeune épouse d’un dictateur africain mégalo assistent impuissants à l’embrasement des milices et à l’effondrement du pays.
Un portrait au vitriol des dictatures de la Françafrique librement inspiré du destin de Mobutu et ses « Versailles de la jungle ».
Un superbe album au graphisme mêlant Afrique contemporaine et esthétique des arts premiers.
« … vous nous enseignez la poésie d’un homosexuel… le ministère a interdit d’étudier Verlaine. Il fait partie de la grande propagande européenne pour introduire l’homosexualité chez nous. On ne l’acceptera plus. Les programmes vont changer, In Sha Allah. »
A travers le positionnement tourmenté - entre rejet et fascination - d’un professeur de littérature française, l’auteur du prix Goncourt 2021, livre ici une plongée dans la société sénégalaise.
Un roman incandescent à l’écriture sensuelle, qui se lit d’un souffle.
« Pourquoi aller en Thaïlande ? il n’y a pas de tombes d’Imams chiites là-bas… »
Feuilletant le passeport de son époux, devant l’imam qu’elle venait consulter, une femme découvre, interdite, que son mari, dévot zélé qui réalisait de fréquents pèlerinages à la Mecque, pour accumuler des bons points spirituels « la seule monnaie qui ne connait pas de dévaluation en Iran », visitait en réalité des prostituées en Thaïlande !
Ramita Navai, croque à l’aide d’une succession de situations tragi-comiques - mensonges et respectabilité de façade – l’intimité de Téhéranais coincés entre soif de modernité occidentale et respect des règles imposées par un gouvernement religieux répressif.
Une lecture réellement passionnante entre fiction et reportage sociologique.
Après la Seconde Guerre Mondiale, les autorités sanitaires chinoises invitaient les familles les plus pauvres à vendre leur sang pour compléter leurs revenus. Une pratique aujourd’hui interdite, après la contamination de centaines de milliers de paysans dans la province de Henan.
Yu Hua déroule la vie d’un livreur de cocons, et de ses camarades, aussi frais qu'attachants. Tous auront recours à cette pratique pour faire face aux épreuves : famines, filles à marier, factures d’hôpital imprévues…
A travers ces vies jalonnées de dons et ces corps vigoureux qui s’étiolent, on vit le passage de la Révolution culturelle et les transformations de la Chine rurale.
Une figure quasi-christique, avec un sens de l’honneur et du dévouement familial chevillés au corps… Un roman inoubliable.
Connaissez-vous Booker T. Washington ? Marcus Garvey ou encore W.E.B. Dubois ? Ce livre vous les fera connaître et vous montrera que les racines des mouvements qui vous sont familiers, Black Panthers ou Black Lives Matter, sont profondes et anciennes.
L’histoire de l’émancipation des Africains-Américains s’écrit dans le cours d’une histoire plus longue. C’est ce travail de synthèse qu’accomplit Caroline Rolland-Diamond dans ce livre admirable
Rédigé par un historien chevronné à la fin de l’année 1940, L’Étrange défaite est un témoignage incommensurable.
Marc Bloch n’est en rien un témoin lointain des causes de l’effondrement de son pays. Officier dans le ravitaillement il rend compte de l’état des esprits, celui de l’État-major, des soldats, des civils et parvient, avec méthodologie, à identifier les origines de la débâcle qui vont engager la France dans une période inconnue et angoissante.
L’Étrange défaite n’est pas un livre d’histoire mais le témoignage lucide et éclairé d’un esprit brillant et d’un citoyen patriote et engagé. Un livre écrit dans une langue d’une fluidité à couper le souffle, et celui d’un homme déjà frappé par le statut des juifs qui mourra fusillé en juin 44 après être passé par les geôles de Klaus Barbie !
Dans ce roman fleuve paru avant la Seconde guerre mondiale, Israël Joshua Singer évoque, dans un style poétique et précis, fait d’entrelacs constants, les nombreux événements qui bouleversèrent l’Europe de la première moitié du siècle dernier : la révolution industrielle ; l’émergence du communisme ; la montée du militarisme ; la guerre et les pogroms.
Ce sont tous ces événements que l’auteur nous fait revivre à travers les yeux de la communauté ashkénaze de Lodz. Car, finalement, l’histoire des frères Ashkenazi n’est qu’un prétexte, sorte de fil conducteur. Le sujet principal est bien ailleurs ; il est tout entier dans cette Europe qui perd la raison, emportée par une folie consumériste, nationaliste, intolérante et belliqueuse.
Un livre d’histoire, passionnant de bout en bout.
Ce livre raconte l'histoire de l'École libre des sciences politiques, fondée en 1872 et connue du grand public sous le nom de Sciences Po dès l'entre-deux-guerres. Lire la suite
« Sciences Po méritait son roman vrai. L'expression est de Paul Veyne, qui voyait ainsi l'histoire. Ce livre s'inscrit dans cette lignée lucide. Il repose sur un riche fonds archivistique et iconographique. Il est le produit d'une recherche et de choix qui dessinent une vérité complexe et foisonnante. Ses images aident à rendre l'épopée vivante et plaisante. » Laurence Bertrand Dorléac, Présidente de la Fondation nationale des sciences politiques.
« Ce livre, qui propose un choix de photos exceptionnelles et pour beaucoup inédites, est publié à l’occasion d’une année particulière dans l'histoire de Sciences Po. Récit d’un passé autant que prémices d’une histoire en devenir, ce Roman vrai de Sciences Po incarne la devise du cent cinquantième anniversaire de l'institution: "Aux racines de l’avenir". » Mathias Vicherat, Directeur de Sciences Po
Notre avis :
" L’âge idéal est 6 ou 7 ans, quand la peau est douce et les articulations tendres…Ma mère ne perdait pas une minute, un coup à gauche, un coup à droite, les 5 orteils étaient enveloppés et parfaitement serrés. À ce moment-là, même si vous l’aviez voulu, vous ne pouviez plus revenir en arrière... »
Selon la coutume les pieds féminins, fantasme masculin, ne devaient pas dépasser la taille de 7,5 cm. Ainsi des pieds de Chunxiu à qui sa famille impose le bandage des pieds et de la poitrine pour lui assurer un bon mariage. Mais devenue adulte, la belle Chunxiu tarde à prendre mari alors que les troubles de la révolution culturelle chinoise résonnent déjà. Aura-t-elle encore une place dans cette Chine nouvelle où intellectuels et propriétaires terriens sont humiliés publiquement, et coutumes et valeurs traditionnelles violemment détruites ?
Un de nos coups de coeur :
Voici après Une vie chinoise – cette fresque historique en deux tomes que nous continuons de vous recommander – notre second coup de cœur à Li Kunwu, qui près de cinquante ans après la Révolution culturelle se souvient avec nostalgie du destin tragique de sa nourrice. Récit intimiste et histoire de la Chine s’entremêlent : un roman graphique riche et émouvant !
Asher Lev est un hassid de Brooklyn. Dès sa plus tendre enfance il dessine avec une virtuosité indéniable. Pour sa communauté comme pour ses parents, ce talent n’est pas un don de Dieu mais une malédiction. Une tentation du sitra ashra, du Mal, qu’il convient d’abandonner. Mais que faire lorsque ce don se transforme en pulsion incontrôlable ?
Quel prix Ashert devra-t-il payer pour vivre librement son art ? Art et religion peuvent-ils coexister ? Abandonnant une tradition pour une autre, Asher Lev connaîtra déchirement, hésitation et peur, mais verra, finalement, s’ouvrir les portes de la gloire et de l’immortalité.
Un roman inoubliable sur l’émancipation et ses conséquences, un roman incontournable sur l’Art et ses exigences. À lire ou relire.
Dans son style si singulier, fait de petites touches et de tableaux, Eric Vuillard parle d’une guerre oubliée qui se déroule essentiellement au Vietnam et d’un territoire colonial aujourd’hui disparu : l’Indochine qui regroupait le Vietnam, le Cambodge et le Laos.
Ce récit ne suit pas le corps expéditionnaire français, ni les unités militaires Viêt-Minh. C’est un récit vu d’en haut, l’évocation d’une guerre menée à la tribune de l’Assemblée nationale et de ses coulisses, sur les plateaux de télévision américains ou dans les salons diplomatiques de Genève.
Eric Vuillard révèle avec une brièveté efficace les raisons qui poussèrent les Vietnamiens à prendre les armes ; il déplore l’entêtement absurde d’une caste de militaires dépassés, et dénonce les scrupules macabres de l’élite financière parisienne durant cette dramatique période. Brillant, glaçant et désespérant.
« Que les langues s’inscrivent dans l’histoire paraît une évidence… et pourtant, l’histoire des langues est peu racontée »
Mon avis : Formidable ce guide "à travers le temps et l’espace" qui nous entraîne, dans un voyage inédit, à la découverte des langues.
Composé de chapitres quasi indépendants les uns des autres, il permet à chacun de suivre ses itinéraires au gré de sa curiosité.
Ainsi du Bislama, parlé au Vanuatu, du Frioulan, dialecte du nord-est de la Vénétie, ou encore du Mandchou, parlé par seulement 18 personnes en 2007, c’est un véritable tour du monde que nous propose Jean Sellier.
En un mot : The perfect livre pour les personas curiosas !
Notre avis :
Dessinateur de propagande, Li Kunwu, fils d’un cadre du parti, raconte avec fascination et remords, sa participation exaltée au « Grand Bond en avant », une jeunesse qui sombrera vite dans une folie dévastatrice faite de pillages, dénonciations et meurtres.
En un mot :
Un roman graphique instructif et passionnant !
Pensé par Jérôme Calauzènes professeur en classes préparatoires Sciences Po, ce manuel très pratique composé de 3 grandes parties vous permettra d’accéder à la bonne méthode de travail afin de répondre aux attentes de Sciences Po Paris sans dénaturer votre personnalité mais en évitant certaines erreurs.
Dans un premier temps vous apprendrez tout ce qu’il faut savoir sur la nouvelle procédure d’admission tout en découvrant « l’esprit Sciences Po ».
Puis, l’auteur propose sa méthodologie pour réussir l’envoi de votre dossier, et surtout livre ses précieux conseils pour la rédaction de votre lettre de motivation si importante. Enfin, vous saurez tout et serez prêt pour l’épreuve angoissante de l’entretien oral grâce à une vingtaine d’entretiens analysés.
Le plus : Un résumé de l’actualité 2020-2021 à télécharger est offert chaque mois par l’éditeur du livre.
Extrait : " Finalement, cette histoire de suicides, c'est terrible, ils ont gâché la fête. Didier Lombard, le 6 mai 2019, à la barre."
Mon avis : Tout le monde se souvient des suicides à France Télécom, une vague d’indignation avait soulevé l’opinion publique mais qui se souvient du procès et de son issue ? Sandra Lucbert y a assisté et se porte témoin pour ne pas oublier. Elle dissèque le vocable imbitable du capitalisme financier, tout en rendant compte des siestes des accusés durant les audiences… Une drôle d’humanité se joue sous nos yeux grâce à la plume littéraire et acerbe de l’auteur, révoltant à n’en pas douter.
Extrait : « De mon séjour à Berlin, je revois une suite de faits hallucinants : les 1ers défilés silencieux des futures chemises brunes ; la transformation rapide des enfants allemands en larves agitées de la Jeunesse hitlérienne… »
Mon avis : Une libraire juive polonaise ambassadrice de la pensée française dans l'Allemagne nazie. Réfugiée en France, l'étau se resserre, elle rêve de fuir en Suisse, dénonciations, incarcérations, et passeurs véreux l’attendent…
Un témoignage fort et émouvant, à la résonnance très actuelle.
Notre avis : Qu’elle parle du déclassement ou de l’exil solitaire d'un migrant aux États-Unis, des maris volages ou de la rencontre involontaire de deux femmes que tout sépare (ethnie, religion, éducation, condition sociale) pendant une violente émeute raciale; ou qu’elle fasse surgir l’ombre de la guerre du Biafra, il règne dans cette très belle série de nouvelles de la jeune romancière nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, un ton juste et une vraie tristesse : celle des femmes humiliées, oubliées, violée; celle des enfants morts et des vies brisées dans le silence des dictatures.
Une grande romancière : Un très beau livre d'une romancière déjà primée aux États-Unis pour ses précédents romans L'Hibiscus pourpre et L'Autre moitié du soleil, ou plus récemment Americanah, tous publiés chez Gallimard
Notre avis :
L'Ordre du jour est de ces livres auxquels on repense souvent après les avoir refermés.
On y repense émerveillé par l'écriture et sidéré par la teneur des épisodes historiques qu'il met en récit.
Eric Vuillard a retenu quelques faits peu connus qu'il fait revivre à la manière de saynètes confinant à la farce voire au dérisoire mais au cours desquels l'élite économique et politique a concrètement laissé le champ libre au nazisme.
340 pages, il n'en fallait pas moins pour aborder l'histoire de l'économie du XVIIe siècle à aujourd'hui !
Best-seller aux Etats-Unis, Economix traite, avec beaucoup d'humour et de rigueur, des tournants économiques historiques et les thèses de grands auteurs classiques.
Les théories d’Adam Smith, l’un des fondateurs du libéralisme économique, de David Ricardo, père du libre-échange, ou encore celles du très célèbre John Maynard Keynes, penseur de la macroéconomie keynésienne, sont largement détaillées et expliquées. Sans oublier des économistes plus contemporains, tel Thomas Piketty, auteur à succès du Capital au XXIe siècle.
En un mot :
La crise économique de 1929, l’industrialisation, l’émergence de Wall-street... n’auront plus de secrets pour vous.
Mon avis : Presque 35 ans après la publication de La Servante écarlate, Margaret Atwood nous fait revenir à Galaad dans cette suite tant attendue.
A travers trois narratrices, nous découvrons toutes les facettes de la vie des femmes sous ce régime fondamentaliste et comment, avec l’aide de certaines, il a été mis en place. Nous en apprenons plus sur les "Tantes" qui surveillent, dirigent et choisissent tout ce qui a trait à la vie des femmes, une occupation bien trop triviale pour les hommes. Après-tout, qui de mieux placées que des femmes pour contrôler d'autres femmes ?
En un mot : Encore plus glaçant, cette suite de La Servante écarlate nous interroge sur ce que nous sommes prêts à accepter pour survivre.
Une oeuvre intemporelle d'une grande force, qui se fait tour à tour pamphlet contre les fanatismes religieux, apologie des droits de la femme et éloge du bonheur présent.
Dans la République de Gilaed – autrefois les États-Unis – sévit un régime fondamentaliste où les libertés individuelles ont été supprimées par le gouvernement monothéocratique. Faisant écho à Orwell, ce roman met l’accent sur le cauchemar que doivent endurer les femmes. Strictement contrôlées, on leur supprime la possibilité de gagner leur vie. Pire, elles sont compartimentées en classes sociales rigides. Dans les catégories acceptées: les « Épouses » (chastes, elles sont au sommet de l’échelle sociale); les « Marthas » (domestiques, elles sont stériles), les « Servantes » (elles peuvent se reproduire) ; les catégories réprouvées se composent quant à elles des « Non-femmes » et des « Jezebels », qui réunissent toutes les formes de déviance (intellectuelles, prostituées, lesbiennes etc.) La narratrice Offred, est une servante qui se souvient de son passé, et qui n’arrive pas à se conformer au rôle qui lui est assigné.
La résistance des bas-fonds s’organise...